Porsche Speedster : près de 70 ans d’histoire

Née à l’initiative de l’influent et visionnaire importateur américain Max Hoffman, la 356 Speedster (pour Speed+Roadster) débute sa carrière en 1955. L’idée est simple et pourtant géniale : créer une Porsche 356 Cabriolet à l’équipement sommaire pour des américains avides de sportives étrangères, mais freinés par des prix prohibitifs comparés aux productions locales. Tarif limite fixé par Hoffman : 3000 $ ! En cette période d’après-guerre particulièrement florissante, la marque allemande écoule déjà plus de la moitié de sa production outre-Atlantique et l’importateur est écouté avec attention. Ferry Porsche relève donc le défi : Pare-brise simplifié et abaissé, capote de secours et vitres latérales en plastique souple, équipements de conforts succincts (sièges minces, tableau de bord minimaliste, pas de boite à gants…), la 356 Speedster est… spartiate ! Mais elle est aussi terriblement belle et son rapport poids/performances est excellent. Le succès est immédiat, la voiture séduit même les stars de l’écran (Steve McQueen ou James Dean) et les pilotes amateurs, pour sa légèreté et son agilité. Une légende est née.

Il faut pourtant attendre près de trente ans pour voir réapparaitre l'appellation Speedster sur une Porsche. C’est sur la 911 Type G, en 1989, que les ingénieurs réitèrent la recette miracle. Intérieur dépouillé, pare-brise abaissé de 8 mm et plus incliné de 5°, capote simplifiée et manuelle et surtout, une magnifique coque à double bossage qui prend place derrière les sièges avant, et abrite le couvre-chef. Les sièges arrière ? disparus ! La capote (dite de secours) n’est pas doublée. Elle est plus bombée que celle du Cabriolet. Sa manœuvre difficile est à réaliser en plusieurs temps et idéalement par deux personnes. Malgré un prix frisant l’indécence et une voiture en fin de carrière (c’est l’année de présentation de la 964), la 911 Carrera 3.2 Speedster séduit le public. Mieux encore, elle se vendra majoritairement en caisse large Turbo Look (M491), une option d’époque à 132 000 FF, permettant ainsi à Porsche d’écouler sans difficultés quelques carrosseries larges qui traînaient dans les couloirs de l’usine. À ce jour, la cote du Speedster 3.2 avoisine les 150 000 €, auxquels il faudra ajouter près de 100 000 € pour un Speedster étroit, plus rare, car produit en plus faible quantité.

Trois ans plus tard, le constructeur de Stuttgart mise de nouveau sur la réussite de cette appellation à succès. Le Speedster emprunte sa mécanique à la 964 Carrera 2 avec des performances similaires au cabriolet Carrera 2. Mais la formule ne réussit pas à tous les coups. Et la Porsche 964 Speedster de la génération 964 en fait les frais. Trop spartiate, trop chère, pas assez sexy, c’est un échec commercial pour la marque. 3000 exemplaires étaient prévus mais seulement 930 exemplaires seront produits ! Erreur marketing ? Contrairement à la Carrera 3.2 Speedster, la 964 Speedster était proposée avec une carrosserie étroite. Ceci expliquerait son succès moindre. Sans le Turbo look, elle ne séduit pas. Néanmoins, quelques clients (une quinzaine) parvinrent à se faire livrer une 964 Speedster à carrosserie large. Porsche a boudé cette appellation durant plusieurs années, à tel point que les générations 993 et 996 en ont été privées (bien que nous ayons la connaissance de deux 993 Speedster produits).

L’année 2011 signe le retour de la 911 Speedster. Pour cela, Porsche fait évoluer l'appellation et se tourne vers plus d’exclusivité et de luxe. Alors que l’idée de base du Speedster est de proposer une version allégée, simplifiée et moins chère de la 356 cabriolet, la Porsche 997 est 44mm plus large qu’une Carrera et presque aussi lourde que la version décapotable (1540 kg au lieu de 1555). Côté prix, on est loin également de l’esprit d’origine :  203 716 €… C’est pratiquement deux fois le prix d’une 997 Carrera S Cabriolet de l’époque.

Dans son évolution, le 997 Speedster laisse de côté la boîte manuelle et impose la boîte de vitesses à double embrayage PDK. Un choix qui ajoute du poids et fait perdre au propriétaire le plaisir simple de manier le levier de vitesses. Cette volonté d’orienter la voiture vers plus de commodité se retrouve à l’intérieur avec une liste d’équipements fournis de série, loin de l’esprit minimaliste et spartiate des premières 356. Elle est plus puissante (kit moteur X51 de 408 ch de série) et fête les 25 ans de la division Exclusive du constructeur. Cependant, la 997 Speedster séduit par ses petits détails qui font craquer les porschistes. Jantes Fuchs inspirées de celles des 911 type G, des ailes arrière élargies, et tout le savoir-faire de Porsche Exclusive Manufaktur à l’intérieur. Sa production se limite à 356 exemplaires, en hommage à la première Porsche du nom. Le succès est au rendez-vous. Aujourd’hui, les 997 Speedster s’échangent autour de 300 000 €. Porsche a trouvé la recette idéale, et ce modèle servira de base pour la génération suivante.

Présentée en 2019, la Porsche 991 Speedster apparaît alors que les premiers modèles de la génération 992 sont déjà sortis. La firme de Stuttgart a retenu la leçon. Les clients veulent de l’exclusivité. Ce sont alors 1948 exemplaires qui sont produits, en hommage à l’année de création de la marque. L’accent est mis sur le luxe, la distinction (pack Heritage Design disponible en option) mais aussi la sportivité (trains roulants élargis et moteur de 510 ch empruntés aux séries GT3). L’esprit quant à lui demeure. Pare-brise abaissé, capote spartiate et manuelle dissimulée par un élément à double bossage qui lui confère sa ligne unique. Bien loin de la première capote qui nécessitait deux personnes pour l’enlever, sur ce modèle, on déverrouille avec un bouton électrique et il faut moins de 30 secondes pour effectuer la manœuvre. Un collector dès sa sortie (tous les exemplaires étaient déjà vendus avant sa présentation), qui, malgré un prix corsé de 273 095 €, se trouve aujourd’hui en occasion à près de 400 000€ ! La voie semble toute tracée pour la future 992 Speedster.

Mis à jour par Charlotte Bazaille