Porsche 911 : l’ADN stylistique de la marque

Avant de devenir le constructeur que nous affectionnons tous, Porsche est un bureau d’étude et d’ingénierie fondé en 1931 par Ferdinand Porsche, ingénieur de génie qui œuvra pour Lohner, Daimler-Benz ou Auto-Union. A la demande du Reich, il conçoit une automobile populaire dont le cahier des charges est clair : produire une voiture capable d’emmener 4 personnes à 100 km/h et coûtant moins de 1000 Reichsmarks. Différents prototypes se suivent jusqu’à la Type 60, qui donnera la KdF-Wagen, mère de la célèbre Coccinelle. Cette voiture, présentée en 1938, ne sera finalement produite qu’à partir de 1946 en raison de la Seconde Guerre Mondiale. Pourtant, elle porte en elle l’ADN stylistique et mécanique des Porsche qui ont suivi : moteur à cylindres à plat, refroidi par air, situé en porte-à-faux arrière, suspensions par barres de torsion, et cette ligne toute en courbes qui inspirera la Type 64 ou Berlin-Rome, véritable point de départ de l’identité visuelle de la marque Porsche. Dessinée par Erwin Komenda, cette voiture de course, au profil aérodynamique révolutionnaire en goutte d’eau et aux roues carénées, ne disputera jamais la course pour laquelle elle avait été conçue, mais Ferdinand Porsche se servira à titre personnel de cette auto construite à trois exemplaires seulement. Au début de la visite du Porsche Museum de Zuffenhausen, c’est d’ailleurs une caisse en alu brut de Type 64 Berlin-Rome qui trône, bien consciente que sa ligne novatrice sera l’inspiratrice de l’identité visuelle future de la marque. Viendront ensuite le roadster 356 n°1, puis les 356 à partir de 1948, la 911 n’arrivera quant à elle qu’en 1963, mais toujours fidèle aux lignes si caractéristiques des premiers modèles… et à son architecture mécanique !

Selon Michael Mauer, Directeur du design Porsche, l’identité Porsche qui caractérise la 911 depuis son apparition mais aussi toutes les Porsche actuellement au catalogue est fondée sur cinq codes de design intangibles :
1.    L’absence de calandre
C’est une des conséquences de la position du moteur en porte-à-faux arrière des Coccinelles, 356 et 911. Le moteur n’ayant pas besoin d’entrée d’air situé à l’avant du véhicule pour alimenter un radiateur situé derrière une calandre. Il en résulte un capot plongeant et bombé caractéristique. Aujourd’hui les radiateurs situés à l’avant des 911 mais aussi des Porsche à moteur avant (Cayenne, Panamera, Macan) ou central (Boxster et Cayman) sont alimentés en air frais par de grandes ouvertures placées dans le bouclier avant. La ligne de capot de toutes les Porsche garde ainsi sa forme si caractéristique.
2.    Le dessin des phares avant
C’est un autre aspect du design provenant en droite ligne des Volkswagen Coccinelle et Porsche Type 64. Ces phares, qui n’ont jamais été ronds ont pourtant toujours gardé le même esprit. Il suffit de regarder un Macan ou une Panamera de ¾ avant pour se rendre compte que le profil elliptique des phares des premières Porsche se retrouve sous cet angle. Même la 996, ainsi que les Boxster et Cayman, qui ont connu d’innombrables variations de la forme de leurs phares, partagent cette caractéristique. Etirés, allongés, déformés suivant les modèles, ils restent pourtant un élément « phare » du design Porsche, immédiatement identifiable.
3.    La Fly Line, ou ligne de toit de type Fast Back
C’est cette ligne de toit fuyante et arrondie, qui va du sommet du pare-brise jusqu’aux feux arrière sans interruption. C’est un des éléments clé du design de la 911 depuis ses débuts et c’est encore un héritage du dessin originel d’Erwin Komenda. Ce dernier, très inspiré de l’aérodynamique voulait un profil proche de celui d’une goutte d’eau afin d’obtenir le meilleur coefficient de pénétration dans l’air au profit des performances. Cette caractéristique stylistique est évidente sur les 911 modernes, mais aussi sur le Cayman, la Panamera, le Cayenne Coupé ou le Taycan. Mais regardez de profil un Macan, un Cayenne ou une Panamera Sport Turismo et vous verrez que malgré le hayon plus vertical de ces dernières, la chute de toit reste progressive et arrondie. Bien dans l’esprit Porsche !
4.    Les ailes bombées
Il est clair que les ailes arrière d’une 930 Turbo sont plus sexy que celles d’une Coccinelle. Et pourtant, cet épaulement si caractéristique des ailes des Porsche, à l’avant comme à l’arrière, provient bien des premières esquisses du Professeur Ferdinand Porsche et de son designer Erwin Komenda… pour la voiture du peuple. L’intérêt n’était pas qu’aérodynamique. Il était aussi économique. Changer une aile abimée de Coccinelle était facilité par la découpe proéminente de ces passages de roues. Aujourd’hui, toutes les Porsche du catalogue ont des ailes magnifiquement galbées. Musclées et viriles aux yeux de certains, terriblement sexy pour d’autres. A vous de voir !
5.    Le vitrage latéral en forme de goutte d’eau
Conséquence directe de la ligne de toit fuyante ou fly line caractéristique de la marque. C’est surtout la forme de la vitre de custode avec son arrondi si particulier qui permet d’identifier instantanément une Porsche vue de profil. Et si vous regardez bien, c’est peut-être la partie de la 911 qui a le moins évoluée depuis sa création en 1963. Indémodable et source d’inspiration pour tous les modèles de la marque, de la berline Panamera au SUV Cayenne en passant par le Cayman. Un must de l’identité Porsche !
 

On peut bien parler d’exception quand on voit le peu de modèles conçus par Porsche qui s’éloignent de son ADN natif. Il y a d’abord la 914, conçue conjointement avec le cousin Volkswagen. Ici, pas de profil aérodynamique ou de phares globuleux. Pourtant, on retrouve quand même dans son dessin le capot plongeant, l’absence de calandre et les ailes galbées caractéristiques. La 924 dessinée par Harm Lagaay et son évolution 944 esquissée par Anatole Lapine sont sans doute celles qui s’éloignent le plus du design Porsche si caractéristique. Leurs formes plus anguleuses et la présence d’un hayon vitré étaient la volonté de l’initiateur du projet : Volkswagen ! Il faudra attendre la 968, dernière évolution de cette PMA et une volonté de Porsche d’harmoniser son dessin à celui du reste de la gamme pour voir en elle une Porsche, grâce au subtil mélange des courbes de la future 993 et de la 928, la dernière Porsche à posséder sa propre identité !

Texte rédigé par Fabien Caron