“Il y a 35 ans de cela, vivre une passion pour la Porsche 911, en posséder une, tout en exerçant le métier de gendarme, dans une unité spécialement chargée de lutter contre les infractions au code de la route et en particulier les excès de vitesse, n’était certes pas facile, voire incompatible pour certains. Il fallait être tout aussi discret que pouvait le permettre ce grand écart entre passion et profession.” confie Pierre.
Lorsqu’il s’est offert sa première Porsche (la 911 SC dont nous parlions auparavant), Pierre logeait en caserne et avait loué un garage à l’extérieur, afin de garder le secret. Mais, cette discrétion n’aura duré qu’un temps, un jour ou l’autre tout finit par se savoir et dans ce département du sud de la France, l’information s’est rapidement répandue. Peu importe, ce propriétaire ne souhaitait pas se priver de sa passion et continuait de profiter des sorties, qu’elles soient sur routes ou sur circuit.
Quand on parle de passion et de métier, Pierre me fait part d’une anecdote pour le moins inattendue: “En 1993, ayant eu une promotion, je suis obligé d’effectuer un stage dit « de commandement » au sein de l’école de Gendarmerie de Tulle. On me demande de préparer, au pied levé, un sujet de mon choix mais dont le thème est en lien avec la Gendarmerie et de le présenter à l’oral devant toute la promotion et les cadres de l’école, le tout filmé par la cellule pédagogique.
Le sujet était tout trouvé.... “La Porsche 911 : prochain véhicule des BRI (Brigades Rapides d’Intervention)”. Ces unités sont chargées d’intercepter les grands excès de vitesse commis sur autoroute. Mon coup de poker menteur a non seulement conquis l’ensemble de l’auditoire, mais comme j’étais particulièrement à l’aise dans la présentation de ce sujet que je maîtrisais, la cellule pédagogique a gardé mon exposé comme exemple de ce qu’il fallait faire et le présenter à toutes les autres promotions qui suivaient. J’avais réussi à faire croire à toute l’assemblée que la gendarmerie allait acheter cette voiture pour remplacer les Peugeot. Ce qui était au début une blague prenait des proportions que je ne soupçonnais pas. J’ai donc été obligé de dire la vérité, et le colonel qui commandait l’école, qui avait de l’humour, ne m’a pas sanctionné mais m’a dit « dommage que votre souhait ne se réalise pas, vous avez réussi à nous vendre du rêve pendant 30 minutes ».
Fort heureusement, les mentalités ont évolué sur le sujet. Par ailleurs, Pierre ne doit pas être le seul porschiste et gendarme sur le territoire. Il me confie qu’il a lui-même perçu le changement de regard et qu’il est tout à fait possible de vivre ses passions au grand jour, même s’il existe une toute petite part d’irréductibles jaloux.